En présence d’une convention d’assistance bénévole, toute faute de l’assistant, fût-elle d’imprudence, ayant causé un dommage à l’assisté est susceptible d’engager la responsabilité de l’assistant (C.Cass., Civ. 1ère, 5 Janvier 2022, n° 20-20331)

L’enfer est parfois pavé de bonnes intentions. L’arrêt publié de la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation montre que toute action, fut-elle louable et animée de bons sentiments, peut aboutir à un sinistre et à une demande d’indemnisation.

La convention d’assistance est un quasi-contrat liant un assistant et un assisté. Ce type de contrat, informel, n’est pas limité à une assistance fortuite et ponctuelle à un assisté en péril.

La notion s’étend aussi à l’aide procurée ponctuellement.

La convention d’assistance bénévole permet à l’assistant, lorsqu’il subit un dommage, de demander réparation à l’assisté sur le fondement contractuel (C.Cass., Civ. 1ère, 16 décembre 1997, 95-18593), voire de la responsabilité du fait des choses (C.Cass., Civ. 2ème, 7 décembre 2006, 04-14953).

Vis-à-vis des tiers, l’assisté doit garantir les conséquences dommageables commises par l’assistant (C.Cass., Civ. 1ère, 17 décembre 1996, n°94-21838). Cette garantie est en principe intégrale mais la faute de l’assistant n’est pas nécessairement exclusive de de garantie pour l’assisté (C.Cass., Civ. 1ère, 5 mai 2021, n°19-20579).

Dans les rapports entre l’assistant et l’assisté, la faute de l’assistant peut être de nature à réduire voire exclure le droit à indemnisation (C.Cass., Civ. 1ère, 2 novembre 2005, 03-12906), sans qu’il soit nécessaire que cette faute présente le caractère de la force majeure (C.Cass., Civ. 1ère, 13 janvier 1998, n°96-11223).

Néanmoins, le fait de procurer une assistance bénévole permet-il à l’assistant de bénéficier une appréhension plus favorable de sa faute ?

Par son arrêt publié en date du 5 Janvier 2022 (C.Cass., Civ. 1ère, 5 Janvier 2022, n° 20-20331), la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation vient préciser qu’aucune faveur ne peut être accordée à l’assistant.

Sur le plan factuel et procédural :

  • le 2 juillet 2014, alors que M. [K] procédait bénévolement à des travaux sur la toiture de la maison de M. [O], un incendie s’est déclaré.
  • Après avoir indemnisé M. [O], son assuré, la société BPCE, soutenant que l’incendie avait été causé par une imprudence de M. [K] lors de l’utilisation d’une lampe à souder, a assigné en remboursement l’assureur de celui-ci, la société Matmut.
  • [O] est intervenu volontairement à l’instance et a sollicité des dommages-intérêts.

Par un arrêt en date du 29 Juin 2020, la Cour d’appel de ROUEN a rejeté les demandes de M. [O] et de la BPCE

  • après avoir relevé que l’utilisation de la lampe à souder avait causé l’incendie
  • estimant que la responsabilité de M. [K] s’apprécie au regard de la commune intention des parties qui exclut qu’en présence d’une convention d’assistance bénévole, l’assistant réponde des conséquences d’une simple imprudence ayant causé des dommages aux biens de l’assisté qui était tenu de garantir sa propre sécurité, celle de ses biens et celle de la personne à laquelle il a fait appel.

Il faut relever que la Cour d’appel s’était référée à la commune intention des parties pour appréhension de la responsabilité de l’assistant, ce qui induit que les parties auraient préalablement convenu entre elles le seuil à partir duquel une action devient fautive. Or, habituellement, l’intention des parties est uniquement recherchée pour caractériser l’existence – ou non – de la convention d’assistance bénévole (animus contrahendi) : le simple fait d’aider une personne, à l’occasion d’un passage sur sa propriété, pour décrocher un nid en haut d’une échelle, est insuffisant pour caractériser une convention d’assistance bénévole (C.Cass., Civ. 1ère, 7 avril 1998, n°96-19171).

M. [O] et de la BPCE ont formé un pourvoi.

Sous le visa de l’article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, la Cour de cassation censure l’arrêt d’appel, en énonçant que :

« en présence d’une convention d’assistance bénévole, toute faute de l’assistant, fût-elle d’imprudence, ayant causé un dommage à l’assisté est susceptible d’engager la responsabilité de l’assistant »

La Cour de cassation estime donc que l’assistance procurée n’induit pas une appréciation plus indulgente de la faute de l’assistant.

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