Evolution de jurisprudence : face à la multiplication des recours préventifs, qui nuit à une bonne administration de la justice, le point de départ du délai de prescription des recours entre constructeurs est repoussé à la date de l’action au fond (C.Cass., Civ. 3ème, 14 décembre 2022, n° 21-21.305)

La 3ème Chambre civile de la Cour de cassation vient de prononcer un arrêt, destiné à double publication (au bulletin et au rapport), ô combien important pour les praticiens du droit de la construction, en offrant davantage de sécurité juridique pour les constructeurs et leurs assureurs.

Cet arrêt concerne le point de départ du délai de prescription des recours en garantie entre constructeurs et la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation opère un revirement de sa jurisprudence établie par son arrêt du 16 Janvier 2020 (C.Cass., Civ. 3ème, 16/01/2020, n°18-25915).

Avec la Loi du 17 Juin 2008, qui souhaitait uniformiser les délais de prescription, un doute est apparu concernant l’application :

  • Soit de l’article 1792-4-3 du Code civil : « En dehors des actions régies par les articles 1792-3, 1792-4-1 et 1792-4-2, les actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs désignés aux articles 1792 et 1792-1 et leurs sous-traitants se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux« .
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Le délai de prescription de l’action récursoire du maître de l’ouvrage, condamné à indemniser son voisin pour des troubles anormaux du voisinage, commence à courir au plus tard lorsque ce maître de l’ouvrage est assigné aux fins de paiement (C.Cass., Civ. 3ème, 13/07/2022, n° 21-14426)

Le trouble anormal de voisinage est un régime de responsabilité sans faute aux multiples applications et répercutions.

La Cour de cassation a ainsi établi un régime de responsabilité sans faute, édictant pour principe que « nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage » (C.Cass., Civ. 2ème, 19 novembre 1986, n°84-16379).

Nul besoin pour le tiers lésé de rapporter la preuve d’une faute. Il lui suffit de démontrer :

  • Que le trouble subi excède les inconvénients ordinaires engendrés par le voisinage
  • Une imputabilité, étant précisé que ce régime de responsabilité de plein droit s’étend aux constructeurs, ceux-ci étant assimilés à des voisins temporaires (Cass.,
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Les projecteurs commandés étaient certes référencés au catalogue mais avaient fait l’objet d’un travail spécifique destiné à répondre à des besoins particuliers : qualification de contrat de louage d’ouvrage / l’entrepreneur qui a indemnisé le maître de l’ouvrage ne peut agir en garantie contre le fabricant que sur le fondement de la responsabilité de droit commun, à l’exclusion de l’article 1792-4 du code civil (C.Cass., Civ. 1ère, 20/04/2022, n° 21-14182)

Les décisions relatives aux EPERS sont suffisamment rares pour être soulignées, a fortiori lorsqu’elles figurent dans un arrêt destiné à la publication au bulletin de la Cour de cassation (C.Cass., Civ. 1ère, 20/04/2022, n° 21-14182). L’occasion de revenir ensuite aussi sur les fondements juridiques susceptibles d’être invoqués par un constructeur contre son fabricant suite à une condamnation.

Les données factuelles sont les suivantes :

  • la ville de Paris a confié à la Société EIFFAGE, assurée par la SMABTP, le lot « électricité », comprenant le remplacement des projecteurs et leur maintenance, d’un chantier de rénovation et de mise en conformité des installations techniques de la fontaine de la place de Catalogne.
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Recours du constructeur contre son vendeur et le fabricant : point de départ du délai du délai de 2 ans de l’article 1648 du Code civil à la date de sa propre assignation et délai de l’article L. 110-4, I du Code de commerce, suspendu jusqu’à ce que sa responsabilité soit recherchée par le maître de l’ouvrage (C.Cass., Civ. 3ème, 16 Février 2022, n°20-19047)

Dans le débat nourri sur la question du recours du constructeur contre sous fournisseur et/ou son fabricant, la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation vient de prononcer un arrêt marquant sa différence persistante avec la 1ère Chambre civile et la Chambre commerciale.

La 1ère Chambre civile et la Chambre commerciale de la Cour de cassation considère que la garantie des vices cachés doit être mise en œuvre dans le délai de la prescription quinquennale extinctive de droit commun, en application de l’article L. 110-4 du Code de commerce, commençant à courir à compter de la vente initiale (Article L.… Lire la suite

Dommages de travaux publics causés aux tiers après réception de l’ouvrage : conditions de l’appel en garantie intégrale du constructeur contre le maître d’ouvrage, sans qu’y fasse obstacle la circonstance qu’aucune réserve de sa part, même non chiffrée, concernant ce litige ne figure au décompte général du marché devenu définitif, (CE, 27 Avril 2021, n° 436820)

En cas de dommages imputables à un ouvrage public, les tiers (par rapport à celui-ci) bénéficient d’un régime de responsabilité sans faute prouvée, tant contre le maître d’ouvrage que contre les constructeurs (CE, 26 Février 2001, n°196759).

Vis-à-vis des tiers, la réception est sans effet sur les droits des tiers pour poursuivre le constructeur. En retour, dans les relations entre le maître d’ouvrage et le constructeur, elle marque la fin de leurs relations contractuelles (CE, Sect, 4 juillet 1980, n°03433).

S’ajoute à la réception la question de l’intervention du décompte général définitif (DGD), marquant la fin des relations financières.… Lire la suite

L’action en garantie des vices cachés doit être engagée dans un bref délai, lui-même enfermé dans le délai de prescription de 10 ans ramené à 5 ans / l’entrepreneur dispose d’une action contractuelle directe à l’encontre du fabricant, fournisseur de son vendeur intermédiaire (C.Cass., Civ. 1ère, 9 Décembre 2020, n° 19-14772)

La 1ère Chambre civile de la Cour de cassation a eu l’occasion en Décembre 2020 de confirmer sa jurisprudence applicable en matière de prescription en matière de garantie des vices cachés et de recours contre le fournisseur.

la 1ère Chambre civile et la Chambre commerciale de la Cour de cassation considère que la garantie des vices cachés doit être mise en œuvre dans le délai de la prescription quinquennale extinctive de droit commun, en application de l’article L. 110-4 du Code de commerce, commençant à courir à compter de la vente initiale (Article L. 110-4, I du Code de commerce : « Les obligations nées à l’occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes« )

Ainsi, dans cette configuration, deux délais doivent être surveillés :

  • Le délai de 2 années qui court à compter de la connaissance du vice
  • Le délai de 5 années qui court à compter de la vente conclue initialement (entre le fournisseur et le fabricant ou entre le fournisseur et le primo-acquéreur par exemple.
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Il revient à l’assureur DO, pour obtenir la condamnation des assureurs, de justifier que la responsabilité des constructeurs assurés qu’il met en cause avait été reconnue par la juridiction de l’ordre administratif, seule compétente pour statuer sur la responsabilité des constructeurs engagés dans un marché de travaux publics (C.Cass., Civ. 3ème, 26 Novembre 2020, n° 19-21742)

L’action directe permet de poursuivre l’assureur d’un responsable en vertu des dispositions de l’article L. 124-3 du Code des assurances. La jurisprudence judiciaire s’est assouplie au fil du temps, en dispensant de rechercher préalablement la responsabilité de l’assurée, ou de déclarer sa créance au passif de la liquidation judiciaire.

Reste cependant à composer avec la dualité juridictionnelle française.

En effet, alors que :

  • La responsabilité du titulaire d’un marché public de travaux relève de la compétence du juge administratif
  • Le Juge judiciaire redevient compétent dès que le contrat unissant le constructeur à un assureur est un contrat de droit privé (l’action directe contre l’assureur est donc rare puisque le contrat ne sera qualifié de droit que s’il répond à la définition de l’article 2 de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001).
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Compétence du Juge administratif pour connaitre du recours d’un constructeur contre le sous-traitant d’un co-défendeur en l’absence de lien de droit privé sur le fondement délictuel, sans limiter limiter l’analyse de la faute aux règles de l’art ou aux dispositions réglementaires (CE, 6 Novembre 2020, n°428457)

Un même chantier peut impliquer une multitude de relations de droit entre les différents acteurs. La situation peut s’avérer d’autant plus compliquée lorsque l’ouvrage est réalisé dans le cadre d’un marché public.

Il faut alors maîtriser les subtilités de la dualité juridictionnelle afin d’éviter l’irrecevabilité d’une demande.

Dans son arrêt du 6 Novembre 2020, le Conseil d’Etat donne un rappel utile, illustrant la – relative – simplification découlant des évolutions jurisprudentielles intervenues depuis plus de deux décennies.

Par une décision en date du 24 Novembre 1997 (Tribunal des conflits, 24 novembre 1997, n°03060 ) le Tribunal des conflits a estimé que « le litige né de l’exécution d’un marché de travaux publics et opposant des participants à l’exécution de ces travaux relève de la compétence de la juridiction administrative, sauf si les parties en cause sont unies par un contrat de droit privé« , au sujet du recours d’un constructeur contre les architectes du chantier aux fins d’indemnisation de son préjudice résultant des fautes commises par ces derniers

Cette solution a ensuite été reprise par le Conseil d’Etat (CE, 2 Août 2011, n°330982) au sujet de l’action d’un maître d’ouvrage contre le sous-traitant d’un constructeur.… Lire la suite

Les désordres litigieux étaient déjà connus dans toute leur ampleur lors de la réception et n’avaient pas évolué par la suite, aucune action du syndicat des copropriétaires fondée sur la responsabilité décennale, seul fondement applicable pour le trouble anormal de voisinage en l’espèce, ne pouvait prospérer (C. Cass., Civ. 3ème, 5 Novembre 2020, n° 19-16425)

Régime favorable au maître d’ouvrage, la responsabilité décennale suppose la réunion de plusieurs conditions, dont le caractère caché du vice lors des opérations de réception. A défaut :

  • soit le désordre est apparent et le maître d’ouvrage a omis de le porter en réserve lors de la réception (ou durant un délai de 8 jours en présence d’un maître d’ouvrage non assisté d’un professionnel lors de la réception dans le cadre d’un CCMI, en vertu de l’article L. 231-8 du CCH :  (Cass., Civ. 3ème, 11 juillet 2019, n°18-14511), ce qui implique un effet de purge, privant le MOA de tout recours contre le constructeur (et sauf son recours contre le maître d’œuvre au titre de son devoir de conseil pour la mission AOR)
  • soit le désordre est réservé et alors la responsabilité du constructeur, tenue d’une obligation de résultat, peut être recherchée sur le fondement contractuel (Cass.,
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Confirmation (bis) : les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer, en l’occurrence l’assignation (C.Cass., Civ. 3ème, 05/11/2020, n°19-20237)

La 3ème Chambre civile de la Cour de cassation a de nouveau, après son arrêt du 1er Octobre 2020 (C.Cass., Civ. 3ème, 01/10/2020, n° 19-21502, JurisData 2020-01-5480) l’occasion de confirmer sa jurisprudence relative au délai de prescription applicable aux recours en garantie entre constructeurs, issue de deux arrêts du 16 Janvier 2020 (C.Cass., Civ. 3ème, 16 janvier 2020, 18-25915 et C.Cass., Civ. 3ème, 16 janvier 2020, n° 16-24352).

Avec la Loi du 17 Juin 2008, qui souhaitait uniformiser les délais de prescription, un doute était apparu concernant l’application :

  • Soit de l’article 1792-4-3 du Code civil : « En dehors des actions régies par les articles 1792-3, 1792-4-1 et 1792-4-2, les actions en responsabilité dirigées contre les constructeurs désignés aux articles 1792 et 1792-1 et leurs sous-traitants se prescrivent par dix ans à compter de la réception des travaux ».
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