Sans preuve de mauvaise foi, point de déchéance de garantie (C.Cass., Civ. 2ème, 5 Juillet 2018, pourvoi n°17-20488)

La déchéance de garantie est la sanction suprême pouvant frapper un assuré. La Cour de cassation se montre par conséquent vigilante dans ses conditions d’application. L’arrêt commenté, destiné à une publicité renforcée, l’illustre.

La clause de déchéance a un fondement contractuel : il faudra ainsi se référer aux dispositions des articles 1101 et suivants du Code civil depuis la réforme de l’Ordonnance du 10 Février 2016). Cette clause figure très généralement dans les Conditions Générales du contrat d’assurance souscrit.

En préalable, il sera donc indispensable pour l’assureur de rapporter la preuve de ce que cette clause de déchéance figure bien parmi les documents contractualisés : c’est à l’assureur d’établir que la clause de déchéance a bien été portée à l’attention de l’assuré (C. Cass., Civ. 1ère, 26 Février 1980, pourvoi n° 78-15824) pour pouvoir s’en prévaloir. Le renvoi aux Conditions Générales par les Conditions Particulières est valable (C. Cass., Civ. 1ère, 17 Novembre 1998, pourvoi n° 96-15126), d’où l’importance de produire les Conditions Particulières signées.

Une fois la preuve de la contractualisation de la déchéance de garantie, reste à valider son application. En faveur de l’assuré, cette clause doit être rédigée de manière claire et non équivoque : il s’agit pour l’assuré de bien comprendre la portée de la clause pouvant lui être opposée. Celui-ci pourra bénéficier également de l’article L. 112-4 du Code de assurances qui exige notamment qu’une clause de garantie apparaisse dans le contrat en « caractères très apparents« .

Sur le fond, l’arrêt commenté amène à s’interroger sur le fait de savoir si une imprécision ou une exagération dans les déclarations pouvaient, à elles seules, justifier l’application de la clause de déchéance de garantie.

En effet, en l’espèce, l’assuré avait déclaré que son véhicule présentait un kilométrage inférieur (80 000 km) à la réalité au moment du vol subi (87 325 km). La Cour d’appel d’AMIENS avait retenu la présence d’une fausse déclaration susceptible d’avoir une incidence sur les conséquences du sinistre, pour faire droit à la demande d’application de la clause de déchéance de garantie invoquée par l’assureur.

La décision d’appel est censurée au motif que « l’assureur doit établir la mauvaise foi de l’assuré pour prétendre à l’application d’une clause prévoyant la déchéance de garantie en cas de fausse déclaration relative au sinistre« . Il ne pouvait suffire pour l’assureur, comme il l’invoquait au travers de son pourvoi, de soutenir que « le kilométrage étant un élément déterminant pour fixer la valeur d’un véhicule en cas de sinistre » et qu’ainsi « cette fausse déclaration était susceptible d’avoir une incidence sur les conséquences du sinistre« .

La solution est rigoureuse et la preuve de la mauvaise foi peu aisée : la Cour de cassation avait déjà pu estimer que des déclarations mensongères sur les dommages subis sont des « motifs insuffisants pour caractériser une exagération frauduleuse du montant des dommages subis, de nature à entraîner la déchéance de garantie » (C. Cass., Civ. 2ème, 3 Novembre 2011, pourvoi n° 10-30876).

Ne restait alors à l’assureur qu’à envisager l’application de la règle proportionnelle de prime prévue à l’article L. 113-9 du Code des assurances, avec un intérêt nécessairement bien moindre…

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