A défaut de reconnaissance, par les assureurs, de la responsabilité de leurs assurés, il appartient au Juge judiciaire de surseoir à statuer jusqu’à ce que la juridiction administrative se soit prononcée sur cette responsabilité (C.Cass., Civ. 1ère, 11/12/2019, n° 18-25441, F+P+B+I)

En écho à l’arrêt prononcé par la 3ème Chambre civile de la Cour de cassation le 21 Novembre 2019 (C.Cass., Civ. 3ème, 21 Novembre 2019, n° 18-21931), la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation vient de publier un arrêt intéressant la question de la compétence juridictionnelle en cas d’action directe, montrant l’intérêt de cette question.

Les limites de la compétence du Juge judiciaire et la nécessité de sursoir à statuer sont clairement rappelées dans la jurisprudence

Sur le plan factuel, il convient de retenir que

  • suivant marché public du 19 décembre 2012, la commune de TUCHAN (la commune) a confié à M. X…, assuré auprès de la société Mutuelle des architectes français (la MAF), la maîtrise d’œuvre des travaux de réhabilitation d’un foyer communal
  • le lot démolition – gros œuvre – étanchéité a été confié à la société Midi travaux, assurée auprès de la société MMA IARD assurances mutuelles (la société MMA)
  • les travaux ont été réceptionnés le 19 novembre 2013
  • à la suite de l’apparition de désordres et après le dépôt du rapport de l’expert judiciairement désigné, la commune a assigné la société Midi travaux, M. X… et leurs assureurs, sur le fondement de l’article 809, alinéa 2, du code de procédure civile, aux fins d’obtenir le paiement de provisions.

Par un arrêt en date du 6 Septembre 2018, la Cour d’appel de MONTPELLIER a

  • écarté sa compétence pour connaitre de la demande dirigée contre les constructeurs, en raison de la nature administrative du contrat :
  • retenu sa compétence pour se prononcer sur l’action directe exercée contre leurs assureurs, auxquels ils sont liés par un contrat de droit privé, en retenant que « les dommages invoqués par la commune, apparus après réception et qui rendent l’ouvrage impropre à sa destination, sont de nature décennale, de sorte que les assureurs des constructeurs sur lesquels pèse une présomption de responsabilité sont tenus d’indemniser la victime des conséquences des désordres résultant de l’exécution défectueuse du marché public« .

Les assureurs ont formé un pourvoi.

Sous le visa :

  • de la loi des 16-24 août 1790
  • du décret du 16 fructidor an III,
  • l’article L. 124-3 du code des assurances

la Cour de cassation (C.Cass., Civ. 1ère, 11/12/2019, n° 18-25.41, F+P+B+I) va censurer la Cour d’appel de MONTPELLIER

  • en rappelant que :

« Attendu qu’il résulte du dernier de ces textes qu’un assureur de responsabilité ne peut être tenu d’indemniser le préjudice causé à un tiers par la faute de son assuré que dans la mesure où ce tiers peut se prévaloir, contre l’assuré, d’une créance née de la responsabilité de celui-ci ; qu’en application des deux premiers, il n’entre pas dans les pouvoirs du juge judiciaire, saisi de l’action directe de la victime contre l’assureur de l’auteur du dommage, de se prononcer sur la responsabilité de l’assuré lorsque celle-ci relève de la compétence de la juridiction administrative »

  • en citant à ce titre plusieurs de ses arrêts : 1re Civ., 3 novembre 2004, pourvoi n° 03-11.210, Bull., 2004, I, n° 250 ; 1re Civ., 23 juin 2010, pourvoi n° 09-14.592, Bull. 2010, I, n° 149
  • considérant que « à défaut de reconnaissance, par les assureurs, de la responsabilité de leurs assurés, il lui incombait de surseoir à statuer jusqu’à ce que la juridiction administrative se soit prononcée sur cette responsabilité, la cour d’appel a violé les textes susvisés« .

Il s’agit d’une confirmation de la jurisprudence.

En présence d’une action directe, le sursis à statuer doit être ordonné dans l’attente de la décision du Juge administratif, le Juge judiciaire disposant de la faculté de saisir celui-ci d’une question préjudicielle en vertu des dispositions de l’article 49 du Code de procédure civile.

Cette question préjudicielle n’est pas dénuée d’intérêt pour l’assureur puisqu’il pourra tirer profit de toute mise hors de cause de son assuré (C.Cass., Civ. 2ème, 14 juin 2012, n°10-17239).

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